Dans la Distribution voilà bien longtemps que l’on ne plaisante plus avec le Digital. Les « barbares », comme on les appelait à l’apparition du e-commerce, ont très tôt inquiété les acteurs « traditionnels ». Mais cette fois les coups de semonce ont laissé place à des tirs nourris et destructeurs.
Redistribution des parts de marché
On savait que les « pure players » avaient pris les premières places sur Internet en matière d’audience. D’après Médiamétrie le trio de tête français est maintenant composé d’Amazon, Cdiscount et Vente Privée qui a relégué la FNAC à la 4ème place au second trimestre 2018. Mais c’est également en termes de chiffre d’affaires en ligne que les nouveaux vendeurs à distance s’accaparent les plus fortes parts de marché.
Ainsi, d’après Kantar Worldpanel, Amazon serait aujourd’hui le premier site d’habillement en France devant Vente Privée et Zalando. Le cabinet d’études va même jusqu’à estimer à plus de 50% la part de marché du géant américain sur les ventes de produits multimédias, 49,4 % de l’e-commerce de livres, 42,5 % des ventes de jouets réalisées sur Internet et près d’un tiers des ventes de matériel multimédia…
Le BtoB n’est pas à l’abri puisqu’Amazon vient de révéler que son offre de 250 millions de références (!) publiée sur sa plateforme Amazon Business génère 10 milliards de dollars de C.A. dans le monde. L’offre a été lancée en France récemment, en février 2018.
Tous les voyants sont au rouge
L’usage du e-commerce progresse inexorablement. Il est entré de plain-pied dans les usages de consommation des Français qui sont déjà plus de 37 millions à acheter en ligne, toutes générations confondues. Y compris chez les plus de 65 ans qui sont plus de 81% à intégrer dorénavant l’e-commerce dans leurs achats, en augmentation de 9 points sur une année.
En proposant des services de vente à domicile les acteurs traditionnels éloignent les consommateurs des magasins. C’est d’autant plus vrai sur l’alimentaire qui présenterait la plus forte progression de l’e-commerce en France, avec les centaines de drives déployés par les différentes enseignes qui démontrent la forte baisse d’intérêt de leurs surfaces de vente aux yeux de leurs clients.
Enfin l’accessibilité accrue des offres via les smartphones confirme que, dans un grand nombre de secteurs, les visites se font à plus de 50% sur ce type de terminaux. Cela va participer à accroître davantage l’appétence des français pour les commandes en ligne ainsi que leur fréquence d’achat.
Alors, la messe est dite ?
Il est évident qu’il va être de plus en plus difficile de concurrencer des modèles de type « amazoniens » qui ont réussi à déployer des organisations et des moyens qui leurs permettent d’optimiser l’efficience de leurs dispositifs mais également la qualité de la promesse faite aux consommateurs : offre pléthorique, efficacité de la réponse aux situations d’achat adressées et qualité du service global perçue par leur clientèle. En matière de vente à distance pure, via tous types de terminaux interactifs, il semble vain de chercher à les concurrencer en singeant leur modèle, d’autant plus lorsque l’on ne dispose pas des moyens financiers colossaux qui seraient nécessaires pour y parvenir.
Il faut par conséquent revenir en premier lieu aux fondamentaux de la Distribution et notamment à 2 points essentiels. Dans un paysage extrêmement concurrentiel, seule la différenciation est le vecteur de la survie. Vendre le même produit, au même prix et avec le même service qu’un pure player efficace est peine perdue. La différenciation par l’offre est par conséquent le premier enjeu. Penser une nouvelle stratégie d’offre est vital. Le second enjeu est lié au fait que la différenciation se fera également au travers du service. Lorsque l’on dispose d’un réseau de magasins étoffé, il est possible de proposer aux acheteurs potentiels des fonctionnalités que les purs VADistes ne peuvent concurrencer.
L’urgence absolue
Encore faut-il que les consommateurs recouvrent le goût et le besoin de s’y rendre. Pour cela il est impératif de redonner du sens aux magasins. En premier lieu il faut les alléger de toutes les familles (voire univers) de produits dont la présence sur Internet est suffisante ou, autrement dit, pour lesquelles l’exposition des produits ou leur disponibilité en magasin ne revêtent qu’un intérêt mineur. Il faut ensuite explorer les pistes prometteuses du « retailtainment », de l’expérience d’achat « augmentée » et de l’intégration de services multicanal et multi supports afin d’accroître leur attractivité.
Et il faut aller TRES vite ! Car les moyens financiers dont disposent les grands acteurs du e-commerce qui envisagent de s’implanter physiquement associés aux recherches qu’ils mènent pour créer de nouvelles expériences en magasin pourraient constituer les vecteurs de la seconde phase de leur invasion...
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