Le désarroi des Enseignes confrontées au Commerce Connecté

Le désarroi des Enseignes confrontées au Commerce Connecté

Le retour des Enseignes traditionnelles dans le match du e-commerce a fait émerger le concept de « Commerce Connecté ». Mais les Enseignes découvrent l’ampleur des efforts à consentir pour déployer un tel modèle.

Voilà un moment que le retour des Enseignes traditionnelles dans le match du e-commerce a fait émerger le concept de « Commerce Connecté ». Les acteurs nés de l’Internet comprennent enfin qu’ils ne sont que des VADistes et que les réseaux de magasins complétés d’un dispositif interactif efficace vont reprendre les parts de voix et de marché qu’ils avaient réussi à leur soutirer. Mais les Enseignes découvrent l’ampleur des efforts à consentir pour déployer un modèle de Commerce Connecté pertinent.

Le 30 janvier 2014 se tenait à l’Université Paris Dauphine une conférence sur le sujet, organisée par le Club Digital, et regroupant plusieurs grands noms de la Distribution. Le titre de la conférence était prometteur : « Le magasin est mort, vive le magasin… connecté ! ». Après avoir expliqué, pour la nième fois, en quoi l’interactif impactait la Distribution, pendant plus d’une heure les intervenants ont bien réussi à démontrer que le magasin était mort. En revanche ils ont été incapables d’expliquer les solutions qui leur permettraient de tirer parti de ce formidable potentiel que représente l’association « physique + digital ».

Evidemment, la Distribution vit actuellement une nouvelle révolution. Les fondamentaux sur lesquels elle s’était construite sont ébranlés du fait de la modification des attitudes et comportement du consommateur en relation avec la nouvelle accessibilité des offres. Dorénavant il utilise largement les supports interactifs au cours de son parcours d’achat. Ce dernier s’étale dans le temps et se morcelle sur un grand nombre de supports. C’est là que se situe la vraie révolution. Car jusqu’à présent, les Enseignes communiquaient dans le but de drainer du trafic vers les magasins, puis, une fois le client sur la surface de vente, cherchaient à déclencher les achats et à maximiser le panier moyen. Aujourd’hui, ce modèle est totalement dépassé. La Distribution doit dorénavant apprendre à gérer au-delà la relation avec tous ses clients, dans le temps, sur l’ensemble du parcours d’achat, depuis et pendant l’avant-vente et jusqu’après la vente.  

Penser « Expérience Client »

Les différentes étapes de ce parcours se déroulent de moins en moins sur un même support mais le plus souvent sur des supports différents : magasin, catalogue, site Internet, smartphones, bornes interactives, tablettes utilisées par le personnel de vente,… Il est par conséquent essentiel que l’Enseigne soit pertinente et efficace à chaque étape et sur l’ensemble du processus et des supports.

La réponse à ce nouveau chalenge se trouve nécessairement dans la construction d’une expérience d’achat multi supports. Les informations et fonctionnalités proposées au client doivent lui permettre de dérouler naturellement son cheminement de pensée, sans qu’il ait le sentiment de régression lorsqu’il passe d’un support à l’autre. Si la qualité de l’information liée aux produits et services, voire sa quantité, est un prérequis, elle n’est cependant pas suffisante. Car l’expérience se construit plus au travers de la qualité du parcours que grâce à l’information Produit mise à disposition du client. Le liant entre les différentes étapes devient donc essentiel si l’on ne veut pas se borner à juxtaposer des informations et des fonctionnalités qui ne permettent pas à un client de suivre naturellement son cheminement de pensée. Il faut concevoir avant tout l’accompagnement multicanal et multi supports de son client.

Mettre en place la « chaine de valeur interactive »

Le liant entre les différents supports se fait au travers de trois composants :

·       Le contenu, toujours accessible, mais mis en forme spécifiquement sur chaque support,

·       Le profil du client, reconnu sur tous les supports,

·       La mémorisation et l’analyse de ses actions qui permettent de comprendre le parcours multi supports.

Ainsi, un client doit pouvoir retrouver aisément en magasin, sur son smartphone ou sur la tablette du vendeur, les produits vus et/ou sélectionnés sur le site Internet de l’Enseigne. A l’inverse, il doit être simple de mémoriser sur son smartphone les références des produits vus en magasin afin de les étudier plus tard, au calme, sur son ordinateur ou sa tablette.

On bâtit de cette façon une véritable « chaine de valeur interactive » qui donne tout son sens au multicanal et au multi supports. Les outils informatiques mis à disposition du personnel de vente en faisantt partie, bien évidemment.

Quand bien même on construirait cette chaîne brique par brique, il est impératif de mettre en œuvre dès le début une architecture applicative qui permettra de tirer parti des trois points évoqués plus haut. L’alimentation et l’exploitation via l’ensemble des supports d’une base de contenus et d’une base de données clients uniques sont les facteurs clé de succès.

Le « mieux » est toujours l’ennemi du « bien »

On mesure à quel point la tâche est ardue. Toutes les grandes fonctions de l’Entreprise sont impactées : des Achats jusqu’aux forces de vente, en passant par l’ensemble des services supports. Les distributeurs ont par conséquent l’obligation d’innover pour transformer l’Entreprise. Mais face à l’innovation ou face à une révolution, on a toujours tendance à en faire trop…

Il est invraisemblable de lancer tous les chantiers à la fois. De la même façon, il est inenvisageable de traiter tous les supports, l’ensemble de l’offre et toutes les situations Clients en une seule et même étape. Après s’être doté d’une vision cible, le lotissement est impératif pour gouverner efficacement tout sujet par trop complexe. Il convient donc de se poser les bonnes questions en la matière. Sur quelle partie de l’offre commencer à travailler ? Quels sont les nœuds du cheminement de pensée de ses clients sur lesquels on se doit d’apporter rapidement une réponse ? Quels scénarii de visite / achats privilégier ? Quels supports sont susceptibles d’être utilisés par les Clients confrontés à ces scénarii ? De quels outils et de quelles informations le personnel de vente doit-il disposer, et quand ? Les réponses permettent d’élaborer un plan d’actions crédible car maîtrisable.

Il faut par conséquent chercher à se placer sur une courbe d’apprentissage qui permette, dès les premières expériences sur des périmètres restreints, de capitaliser sur les règles marketing et commerciales ainsi découvertes. En matière d’innovation, le « mieux » est toujours l’ennemi du « bien » !

Convaincre et conduire le changement

Mais avant tout cela, il faut déjà convaincre. La dictature du Retour Sur Investissements mesuré sur des cycles de plus en plus courts est totalement incompatible avec la démarche d’innovation et l’impérative conduite du changement au sein de l’Entreprise. Il ne faut pas commencer par raisonner RSI mais plutôt considérer l’impérieuse nécessité de faire évoluer le modèle de la Distribution et des relations avec ses clients. Pas simple compte tenu du climat économique actuel… Et pourtant… Comment imaginer qu’une Enseigne pérennise à long terme ses parts de marché si elle n’est pas en mesure d’accompagner, voire d’anticiper, les nouveaux comportements de ses clients ? Le passage au « Commerce Connecté », qu’il soit considéré comme un mal nécessaire ou comme une opportunité, est LE sujet qui doit dorénavant être prioritairement intégré à toute stratégie de distribution.

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